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LE SIXIEME CONTINENT, UN LABORATOIRE POUR LE MONDE
ANTARCTIQUE, BASES DUMONT D'URVILLE & CONCORDIA © THIBAUT VERGOZ (en partenariat avec l'IPEV et le CNRS) / ZEPPELIN NETWORK

Coupés du monde en Antarctique, quelques dizaines d'hommes et de femmes travaillent en permanence sur les deux bases scientifiques de l'Institut polaire français (IPEV). Outre la base Dumont d'Urville, où les ornithologues se succèdent depuis sa création en 1959, le site de Concordia est devenu le paradis des glaciologues : ils peuvent prélever des carottes de glace renfermant un million d'années d'histoire climatique. C'est là aussi que l'ESA étudie les effets du confinement et du manque d'oxygène en vue des futures missions habitées sur Mars.

Installée sur la côte de la Terre-Adélie, la base Dumont d'Urville accueille en 2015 la 65e mission depuis sa création en 1959 par les Expéditions Polaires Françaises, alors dirigées par Paul-Emile Victor. Quant à l'ultra-moderne base Concordia, perdue au coeur de l'Antarctique et perchée sur trois kilomètres de glace, elle prépare son 11e hivernage polaire. Tout ceci dans un seul but : mener à bien des recherches scientifiques engagées, que seul l'isolement extrême de l'Antarctique permet.

Paradis des glaciologues, le site extraordinairement froid et isolé de Concordia (jusqu'à -84°C en hiver) permet de prélever des carottes de glace renfermant un million d'années d'histoire climatique. C'est là aussi que l'Agence Spatiale Européenne (ESA) y étudie les effets du confinement et du manque d'oxygène en vue des futures missions habitées sur Mars. Dumont d'Urville est aussi le terrain des ornithologues qui y étudient les manchots depuis des décennies.

Mais organiser des expéditions en Antarctique est incroyablement complexe. Un défi logistique et humain hors-norme impliquant de naviguer pendant des jours parmi les icebergs, de débarquer des centaines de tonnes de vivres et de matériel en hélicoptère, ou encore de faire décoller des avions montés sur skis par -50°C. Mais pour ravitailler Concordia à 1100 km de la côte et de Dumont d'Urville, il n'y a qu'un moyen : le « Raid », un convoi terrestre de tracteurs et de containers, capable d'affronter les vents catabatiques dévalant à plus de 200 km/h les pentes de la calotte glaciaire, de manière quasi imprévisible.

L'Antarctique est impitoyable. Et comme si ce n'était pas suffisamment difficile, voilà que depuis deux ans, la banquise se maintient en été. Une véritable barrière de glace, large de plusieurs dizaines de kilomètres, empêche L'Astrolabe, le navire polaire de l'IPEV, d'atteindre Dumont d'Urville. Une catastrophe logistique, scientifique et écologique. Car avec un navire coincé dans la banquise, il faut réaliser des centaines d'allers-retours périlleux en hélicoptère pour acheminer les vivres et le matériel. Les scientifiques manquent de temps pour finaliser leurs travaux et doivent rivaliser d'ingéniosité. Quant aux manchots, ils meurent par centaines, la mer nourricière étant reléguée à 30 km de leurs nids.

LE PHOTOGRAPHE THIBAUT VERGOZ

Écologue et géographe de formation, Thibaut a travaillé plusieurs années dans le milieu de la recherche scientifique en tant que biologiste de terrain, avant de se consacrer à la photographie. Il considère ce médium comme un moyen de découvrir, de pénétrer et de documenter les univers qui le fascinent - un moyen d'observer au plus près le monde qui l'entoure. Il s'intéresse à des sujets très variés, mais l'isolement, les populations en marge, les extrêmes et les problématiques environnementales restent au coeur de sa réflexion.
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Une expédition de géographes et de glaciologues français a gravi plusieurs sommets de l'Himalaya au Népal pour étudier sur le long terme les effets du réchauffement climatique. Et les glaciers de haute altitude résistent plutôt bien. C'est le verdict issu de 10 ans de données, un chiffre modeste s'il est comparé aux Alpes où certains glaciers sont suivis depuis 60 ans. Mais ici, les données sont rares parce qu'elles sont très dures à aller chercher.