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AL-MINYA LE CALVAIRE DU CALCAIRE
GOUVERNORAT DE MINYA, ÉGYPTE © LUCIEN MIGNÉ / AGENCE ZEPPELIN
Lunaire, Al-Minya est comme un piège à ciel ouvert. Dans cette plaine désertique, à 250 kilomètres au sud du Caire, près de 20 000 ouvriers découpent des briques de calcaire pour satisfaire le marché national de la construction. Un enfer pavé de pierres blanches où l'atmosphère cotonneuse prend à la gorge. Les ouvriers n'ont que foulards et lunettes de soleil pour se protéger. Insatiables, les machines soulèvent de redoutables nuages de poussière qui provoqueront tôt et tard de graves silicoses et embolies pulmonaires. Dans ce brouillard mortel, les scies circulaires font tellement de bruit que ceux qui les conduisent doivent donner des coups de marteau sur le métal pour prévenir les ouvriers de leur arrivée.

La formation d'un syndicat des travailleurs du calcaire en 2011, après la révolution égyptienne, n'a malheureusement pas fait évoluer les conditions de travail. Les blessés ou les familles des victimes n'obtiennent, la plupart du temps, aucune compensation, car la majorité des quelque 300 carrières sont illégales : aucun contrat de travail n'est établi, et aucune assurance ne protège les employés. La plupart d'entre eux viennent des villages aux alentours d'Al-Minya. Dans cette région en difficulté économique, l'extraction du calcaire constitue l'une des rares opportunités de gagner sa vie.
[Al-Minya, Égypte] À l'intérieur des carrières, la chaleur peut atteindre plus de 50°C en raison de la réverbération des rayons du soleil sur la blancheur de la pierre.





[Al-Minya, Égypte] Le bruit assourdissant des machines et les nuages de poussière qu'elles soulèvent rendent la communication entre les employés difficile. Les conducteurs, qui avancent rapidement, doivent frapper le métal à coups de marteau pour avertir les ouvriers de leur arrivée.


[Al-Minya, Égypte] La poussière de calcaire atteint la cornée, provoquant des douleurs oculaires chez les ouvriers. Les foulards et autres masques de fortune n'empêchent pas la silice de pénétrer dans les poumons, provoquant à long terme de graves silicoses et embolies pulmonaires.
[Al-Minya, Égypte] Les ouvriers travaillent par équipes. Les plus jeunes sont chargés de décaler les rails au fur et à mesure des passages de la machine. Ils emploient des cannes métalliques pour ajuster l'écart à celui d'une brique.





[Al-Minya, Égypte] Beaucoup d'ouvriers ont commencé à travailler dès l'âge de 13 ou 14 ans dans les carrières, pour un salaire réduit par rapport aux adultes.


[Al-Minya, Égypte] Dans un nuage de poussière, les travailleurs installent les lames de scies circulaires qu'ils viennent d'aiguiser.
[Al-Minya, Égypte] Un ouvrier conduit la machine, surnommée « al Fassalah » (la Faucheuse) par les ouvriers, pour découper le sol de calcaire.





[Al-Minya, Égypte] Le sol des carrières est jonché de nombreux câbles électriques à haute tension servant à alimenter les énormes scies circulaires. Ces câbles peuvent provoquer des électrocutions si les gaines sont endommagées.


[Al-Minya, Égypte] Ce générateur d'électricité artisanal ne dispose d'aucune protection. Malgré les demandes du syndicat des travailleurs, les propriétaires des carrières ne veulent investir pas dans des équipements plus sécurisés.
[Al-Minya, Égypte] Après le passage des machines, le sol des carrières est transformé en un champ de briques de calcaire.





[Al-Minya, Égypte] Un chef d'équipe supervise le remplissage d'un camion dont la répartition des tâches dépend de l'expérience de chaque ouvrier.


[Al-Minya, Égypte] Avec habileté, les ouvriers lancent les briques de calcaire dans la remorque de façon à ce qu'elles s'encastrent les unes dans les autres.
[Al-Minya, Égypte] Les briques seront utilisées dans la construction de bâtiments dans toute l'Égypte, alors que la poudre est exportée à l'international pour servir de matière première à l'industrie cimentière, pharmaceutique, ou encore à la teinturerie.





[Al-Minya, Égypte] Les briques de calcaire sont acheminées vers la ville d'Al-Minya, ou comme sur ce bon de livraison, directement à la société de construction.


[Al-Minya, Égypte] Le patron distribue aux chefs d'équipe l'argent qu'ils ont gagné pendant la journée. Le salaire moyen est de 120 livres égyptiennes (6 euros) par jour.
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LE PHOTOGRAPHE LUCIEN MIGNÉ
Basé à Marseille, Lucien réalise des reportages qui explorent les mécanismes humains, sociaux et environnementaux qui façonnent notre monde actuel. Après plusieurs années de voyages pendant lesquelles il a aiguisé son œil de photographe, il a entrepris des études de cinéma et réalisé plusieurs courts-métrages. Il s'est ensuite tourné vers la photographie documentaire, dans la continuité de son approche de cinéaste : celle de raconter des histoires avec des images.