REPORTAGES PUBLICATIONS CONTACT
BIKINGMAN L'ULTRACYCLISME SANS ASSISTANCE
OMAN + LAOS © THIBAUT VERGOZ / AGENCE ZEPPELIN
Les courses d'ultra-endurance et sans assistance sont une nouvelle tendance dans le monde du cyclisme, à contre-courant des compétitions traditionnelles et controversées telles que le Tour de France. Le « BikingMan » créé par Axel Carion – un Français de 33 ans – est un championnat d'un type nouveau, qui regroupe en 2019 six épreuves réparties dans le monde entier. Chaque course est longue de 700 à 1650 km pour 7 000 à 30 000 m de dénivelé… à réaliser sans assistance en moins de 120 heures ! Les concurrents doivent gérer eux-mêmes leurs efforts, leurs repos et leurs ravitaillements, pour terminer ces courses extrêmes dans le temps imparti.
1050 kilomètres à Oman

Pour la deuxième édition du championnat BikingMan, en 2019, le calendrier compte six épreuves réparties dans le monde entier : Oman, France (Corse), Laos, Taïwan, Amérique du Sud et Portugal. La première manche a lieu dans le désert à Oman : 1050 km pour 7200 m de dénivelé positif. On est loin des 23 500 m d'ascension de l'épreuve sud-américaine, mais l'écrasante chaleur de ce désert (pouvant frôler les 40°C même en février), les interminables lignes droites en plein cagnard, les tempêtes de sable et la terrible ascension du Jebel Shams (un col redoutable à 2000 m d'altitude dont la route n'est revêtue que sur une partie de la montée) suffisent à en faire une épreuve extrême.

59 coureurs, dont 11 femmes, sont venus du monde entier pour relever le défi. Le contrat est simple : ils prennent le départ tous ensemble à 3 heures du matin le 24 février, et doivent rallier la ligne d'arrivée 1050 km plus loin le plus rapidement possible, en suivant une route imposée avec leur GPS, sans dépasser les 5 jours. À eux de gérer au mieux leur vitesse de progression, leur repos, leur alimentation, leur ravitaillement en eau, etc. En respectant une règle fondamentale : aucune aide extérieure n'est autorisée ! Y compris l'aide des autres coureurs en roulant, par exemple, en peloton. Un effort long et solitaire (ou en duo, pour ceux qui décident de s'inscrire en équipe de deux) où l'aventure prend une part très importante.

Sur un BikingMan, tout est superlatif, y compris les écarts entre participants. Le vainqueur de l'épreuve, Rodney Soncco (Pérou) triomphe après 38 heures et 17 minutes d'effort… soit 2 heures et 15 minutes avant le deuxième et… 70 heures (3 jours) avant la lanterne rouge ! Et dans cette épreuve mixte où les jambes sont importantes, mais où c'est avant tout la tête qui fait la différence, les deux sexes se mêlent de manière homogène au classement final : deux femmes, Jasmijn Muller (Pays-Bas) et Helle Bachofen (Danemark), finissent la course dans le top 10. Quant au doyen de l'épreuve, Rob Packam (Royaume-Uni), 70 ans, il terminera à une très honorable 48e position, après 81 heures et 25 minutes d'effort ! Le premier Français pointe à la 19e position du classement. Il s'agit de Stéven Le Hyaric, un aventurier professionnel de 32 ans qui vient tout juste de traverser l'Himalaya à VTT, et participait à la course d'Oman avec… 2 côtes cassées et une omoplate fracturée suite à une chute de vélo quelques jours auparavant… et dans quelques semaines il prendra le départ d'un Paris-Dakar à vélo !

Au final, seulement 7 participants n'atteindront pas la ligne d'arrivée à Mascate, la capitale du sultanat d'Oman, dont 5 sur blessure (dont 2 clavicules), un sur problème mécanique, et un unique abandon « simple ». Pour Axel Carion, qui supervise la course, pas le temps de se reposer : « C'est aussi épuisant que d'y participer ! ». Et dans un mois et demi, direction la Corse pour la deuxième épreuve de la saison !

« Avec le BikingMan, j'ai voulu permettre à monsieur tout le monde de ressentir ce que j'ai vécu au cours de mes nombreuses aventures à vélo, et en particulier les plus difficiles où l'effort et l'exploration se mêlent et créent une expérience humaine et sportive inoubliable, » explique Axel Carion, 33 ans, le jeune créateur de ce championnat d'ultra-cyclisme. Après plusieurs grandes expéditions cyclistes, cet aventurier établit en 2017 le nouveau record du monde de la traversée de l'Amérique du Sud à vélo sans assistance : 10 685 km et 74 600 m de dénivelé positif en moins de 50 jours ! Ainsi rompu aux nombreux défis logistiques imposés par ce type d'expéditions, il décide de créer le BikingMan afin de permettre au « cycliste lambda » d'accéder à l'aventure des courses extrêmes, mais en s'épargnant le casse-tête de l'organisation.

Race Across America, Transcontinental, … les courses cyclistes d'ultra-longue distance sont une nouvelle tendance dans le monde du cyclisme, à contre-courant des compétitions traditionnelles et controversées telles que le Tour de France. Non seulement l'assistance est réduite au strict minimum, contrairement aux grandes épreuves traditionnelles, mais en plus les participants de ces courses ne sont pas des professionnels, la plupart sont des cyclistes amateurs qui souhaitent avant tout se dépasser et terminer la course. Parmi eux, une poignée sont des aventuriers semi-professionnels ou professionnels qui collectionnent les défis en tous genre.

11 000 mètres de dénivelé au Laos

La troisième course du championnat d'ultra-cyclisme BikingMan 2019 a lieu au Laos au début de la saison chaude, qui correspond également a la saison des pluies… C'est la première fois qu'une course cycliste aussi dure est organisée au Laos, et l'épreuve s'est révélée d'une difficulté effroyable pour les… 15 participants qui ont osé prendre le départ : 780 km et 11 000 m de dénivelé à avaler en moins de 5 jours, sans assistance. Les concurrents, venus du monde entier (dont 2 Français) ont dû affronter des températures atteignant les 45°C une humidité extrême, les routes défoncées de l'Asie du Sud-Est, la jungle, des pluies terribles et des cols à près de 2000 m d'altitude. Près de la moitié des coureurs abandonneront la course, épuisés, déshydratés, terrassés par la chaleur. Le vainqueur, l'Australien Jason Black franchira la ligne d'arrivée après 52 heures d'efforts.

 Un texte de 12 000 signes est disponible à la demande.
© THIBAUT VERGOZ / AGENCE ZEPPELIN







LE PHOTOGRAPHE THIBAUT VERGOZ
Écologue et géographe de formation, Thibaut a travaillé plusieurs années dans le milieu de la recherche scientifique en tant que biologiste de terrain, avant de se consacrer à la photographie. Il considère ce médium comme un moyen de découvrir, de pénétrer et de documenter les univers qui le fascinent - un moyen d'observer au plus près le monde qui l'entoure. Il s'intéresse à des sujets très variés, mais l'isolement, les populations en marge, les extrêmes et les problématiques environnementales restent au coeur de sa réflexion.