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LES PYRÉNÉES SOUS LA FOULE
HAUTES-PYRÉNÉES ET ARIÈGE, FRANCE  •  PHOTOS © PASCAL THOLE / AGENCE ZEPPELIN
Elles n'ont jamais été autant piétinées. Les aires de protection des Pyrénées, qui sanctuarisent des paysages époustouflants, ont du mal à contenir leurs visiteurs. Aux premières loges, les gardiens des refuges de montagne sont tiraillés entre les exigences de leurs clients et la sobriété qui s'impose en pareil isolement. Des enjeux d'autant plus sensibles que les sécheresses de ces dernières années menacent à leur tour ces milieux fragiles.  LIRE LA SUITE
[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Au milieu du mois d'août, le parking du Puntas affiche complet. Il permet d'accéder au fameux Pont d'Espagne datant de 1886 et à la cascade éponyme. Il est aussi un point de départ pour randonner sur le plateau du Clot, et jusqu'aux vallées des Oulettes et du Marcadau. Cette aire de bitume peut contenir 1800 véhicules. Elle a été réhabilitée en 1995 dans une volonté de rassembler les véhicules et leur pollution visuelle et sonore. Le tarif pour s'y garer s'élève à 8 euros à la journée.





[Gavarnie-Gèdre, Hautes-Pyrénées] Des randonneurs s'élancent sur le GR10 au sein du Parc national des Pyrénées. Depuis le parking de Gavarnie, l'itinéraire balisé offre une montée de 2 heures, soutenue mais régulière. Certains feront l'aller-retour dans la journée, d'autres passeront la nuit au refuge des Espuguettes.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Des promeneurs de tous âges se croisent près du déversoir du lac de Gaube, en aval du Vignemale, dont on devine les crêtes frontalières en arrière-plan. La randonnée depuis le Pont d'Espagne ne prend que 1h15, mais un télésiège permet d'acheminer les personnes les plus faibles jusque-là.
DES REFUGES BONDÉS
[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Des randonneurs se prélassent sur la terrasse du refuge des Oulettes de Gaube, à 2151 mètres d'altitude. Il est 16h30 et certains ont d'ores et déjà installé leur bivouac, malgré le règlement du Parc national qui interdit de dresser une tente entre 9 et 19 heures.





[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Co-responsable du refuge des Oulettes de Gaube, Claire accueille une randonneuse qui a réservé sa nuitée sur Internet. Pendant la période de gardiennage (de mi-février à mi-octobre), elle est présente une semaine sur deux pour diriger ce refuge où l'informatique est devenue indispensable à la gestion des réservations.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Après l'effort de la montée et sous la chaleur du mois d'août, les promeneurs arrivés au refuge des Oulettes de Gaube n'hésitent pas à se déshabiller. En arrière-plan, sur le versant nord du Vignemale, on distingue le glacier des Oulettes qui donne naissance au gave de Gaube. Comme bon nombre de glaciers pyrénéens, il vit ses dernières années – leur disparition est estimée autour de 2040.
UNE LOGISTIQUE TENDUE
[Gavarnie-Gèdre, Hautes-Pyrénées] À la saison estivale, les refuges pyrénéens affichent souvent complet. Celui des Espuguettes offre une capacité d'accueil de 54 places, réparties en dortoirs de 5 à 10 lits. À ceux-là s'ajoutent les campeurs qui dorment sous tente. Ici, au moment du dîner dans le réfectoire, l'effervescence est à son comble.





[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Les gardiennes du refuge des Oulettes de Gaube se préparent à servir le dîner. Elles doivent adapter leurs menus aux différents régimes alimentaires des randonneurs. Végétariens, végans, sans gluten, sans lactose, sans fruits secs, sans coriandre… autant d'allergies, d'intolérances et d'aversions à prendre en compte pour satisfaire les clients.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Au sein de chaque refuge, le dîner est servi à 19 heures. C'est un moment important pour les gardiens qui en profitent pour rappeler quelques informations pratiques à leurs clients réunis. Bondé en période estivale, le refuge des Oulettes de Gaube offre une capacité d'accueil de 95 places. À ceux-là s'ajoutent les campeurs qui dorment sous tente.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Des randonneurs profitent des dernières lueurs du jour devant le refuge des Oulettes de Gaube où ils vont passer la nuit. Aujourd'hui, tous les refuges sont équipés de panneaux solaires. Certains stockent l'électricité produite dans des batteries, beaucoup ont également un groupe électrogène en dépannage.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Claire, co-responsable du refuge des Oulettes de Gaube, contrôle la pico-centrale hydraulique qui produit de l'électricité en complément des panneaux photovoltaïques. Seule contrainte de ce système, il faut un débit d'eau suffisant pour faire tourner la turbine. Tous les refuges ne peuvent donc pas en être équipés.


[Bordes-Uchentein, Ariège] Laurent, co-gérant du refuge des Estagnous, consulte le registre des réservations à proximité d'un congélateur. En montagne, la gestion des stocks est délicate, surtout avec les produits frais ou surgelés. « Habituellement, on ne réalise que deux gros ravitaillements héliportés dans la saison, mais depuis quelques années, avec l'augmentation des randonneurs et une consommation différente, on est obligé d'en faire un supplémentaire. »


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Au sein du refuge des Oulettes de Gaube, les clients sollicitent constamment les prises électriques afin de recharger leurs téléphones, GPS, batteries externes, etc. Tous ces objets font maintenant partie de l'attirail de chaque randonneur ; ce sont d'ailleurs des outils précieux pour la sécurité en montagne. Il est donc indispensable pour les refuges de distribuer de l'électricité et des prises multiples, un enjeu de taille pour ces structures autonomes.
PARTAGER L'EAU QUI S'ÉPUISE
[Cauterets, Hautes-Pyrénées] En août, le soleil illumine les crêtes du Vignemale dès 7 heures du matin. Hébergés au sein du refuge des Oulettes de Gaube, ou dans une tente dressée à proximité immédiate, certains randonneurs sont déjà en chemin. Quelques-uns sont même partis à 5 heures.





[Bordes-Uchentein, Ariège] L'eau du refuge des Estagnous est captée en amont, dans une source qui se trouve au creux d'une combe. « À la fin de la saison 2022, cette source n'alimentait plus suffisamment le refuge et nous avons dû fermer plus tôt que prévu », se souvient Stéphane, co-gérant du site.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Deux gardiennes nettoient la vaisselle au sein du refuge des Oulettes de Gaube. Ici, la quantité d'eau dépend des aléas climatiques auxquels la saison estivale est particulièrement sensible. C'est pourquoi la plonge requiert d'être méthodique pour ne pas gaspiller l'eau.


[Bordes-Uchentein, Ariège, France] Deux fois dans la saison, Stéphane contrôle la fosse septique du refuge des Estagnous. « Celle-ci commence à être sous-dimensionnée par rapport à la fréquentation croissante de ces dernières années », confie le co-gérant du refuge.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Des toilettes sèches ont été installées à l'extérieur du refuge des Oulettes de Gaube. Elles ont deux rôles : consommer moins d'eau et éviter les problèmes d'assainissement. Celles-ci permettent de décanter les déjections, séparant les urines des excréments.
CONTENIR LE FLOT DE RANDONNEURS
[Cauterets, Hautes-Pyrénées] La hausse de la fréquentation modifie progressivement l'environnement, comme ici avec l'apparition d'un sentier « sauvage » près du refuge des Oulettes de Gaube. Les randonneurs sont plus nombreux à sortir des chemins balisés, piétinant la végétation qui protège des sols fragiles, transportant sous leurs semelles des agents pathogènes qui affectent une partie de la faune.





[Gavarnie-Gèdre, Hautes-Pyrénées] Les agents du Parc national des Pyrénées ont disposé des branches en travers d'un raccourci pour inciter les randonneurs à rester sur le sentier principal, près du refuge des Espuguettes. Cette pratique est courante en montagne, mais la hausse de la fréquentation et le changement climatique accélèrent le ravinement des sentiers lors des fortes pluies.


[Gavarnie-Gèdre, Hautes-Pyrénées] Éric, agent du Parc national des Pyrénées, tend une corde de balisage pour dissuader les randonneurs de sortir du sentier. « Quand on explique aux gens ce que l'on fait pour préserver l'environnement, ils le comprennent et l'approuvent. Ce qui leur manque, c'est la connaissance du milieu et les dommages qu'ils peuvent lui causer. En ce sens nous avons un rôle pédagogique. »


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Des randonneurs empruntent un sentier en aval du refuge des Oulettes. Quelques portions de l'itinéraire sont matérialisées par de grosses pierres, dont certaines ont été redressées et empilées sur les côtés de telle sorte qu'elles ne soient pas franchies.


[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Un cairn a été érigé sur le sentier qui conduit au refuge des Oulettes. Ce type d'amoncellement est utile pour s'orienter sur les sentiers peu visibles ou peu balisés. Réalisés en excès, à titre récréatif, ils participent directement à l'érosion des sols dès lors mis à nu.
FORMER LES GARDIENS DE DEMAIN
[Aston, Ariège] Isabelle, géologue de formation, est accompagnatrice en moyenne montagne depuis une vingtaine d'années. Elle intervient dans le cursus universitaire des futurs gardiens de refuge pour leur expliquer la formation de la Terre, et plus particulièrement celle du milieu montagnard. Une fois embauchés, ce sera à eux de transmettre ces informations aux randonneurs.





[Foix, Ariège] Des étudiants se forment à la lecture de cartes pour passer le diplôme universitaire de « gardien de refuge » dans les locaux de l'Institut supérieur du tourisme, de l'hôtellerie et de l'alimentation (ISTHIA).


[Orlu, Ariège] Les futurs gardiens de refuge participent à un héliportage, une opération récurrente en montagne. Ici, ils remplissent des big bags de denrées, de combustibles et de matériel pour ravitailler le refuge d'En Beys.
TOUT MONTER, PUIS TOUT REDESCENDRE
[Orlu, Ariège] L'hélicoptère assure sa mission de levage et de transport de marchandises pour ravitailler le refuge d'En Beys, situé 1120 mètres plus haut, au cœur de la Réserve nationale de faune sauvage d'Orlu.





[Cauterets, Hautes-Pyrénées] Les déchets constituent un poste important dans les refuges. Gardé pendant une grande partie de l'année, celui des Oulettes de Gaube en génère de plus en plus, ce qui requiert de les descendre en hélicoptère. Il s'agit d'ailleurs du deuxième refuge français en termes de fréquentation, avec 9 590 nuitées en 2024.


[Gavarnie-Gèdre, Hautes-Pyrénées] Pierre, aide-gardien au refuge des Espuguettes, entame sa redescente vers le village de Gavarnie. Il porte avec lui les poubelles de la cuisine et un fût de bière vide. Ici, il n'y a qu'un seul héliportage en début de saison. Ensuite c'est au tour des mules ou du personnel de ravitailler le refuge et de descendre les déchets.
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LE PHOTOGRAPHE  PASCAL THOLE
Pascal se plonge dans le photojournalisme et la photographie documentaire pour répondre à la curiosité qui nous anime, et mieux comprendre les enjeux du quotidien. Il photographie des anonymes dont la vie ordinaire constitue leur richesse. C'est ainsi, au cours de discussions, de rencontres ou bien de lectures, que les sujets se dévoilent devant lui. Originaire des Pyrénées, ses reportages s'inspirent du territoire qu'il affectionne ; ils abordent essentiellement des thèmes sociaux et environnementaux.